La Russie a menacé ce vendredi 28 juin les Occidentaux de « confrontation directe » à cause de « l’intensification » des vols de drones militaires américains en mer Noire, au large de l’Ukraine, quelques jours après de premières menaces visant Washington à la suite d’une frappe en Crimée annexée.
Moscou considère que l’aide fourni à Kiev en matière d’armements, de collecte de renseignement et d’identification de cibles en territoire russe a fait des Etats-Unis et de leurs alliés des parties au conflit en Ukraine, que le Kremlin a exacerbé en février 2022 en lançant ses forces à l’assaut de sa voisine.
Les vols de drones américains en mer Noire « multiplient la probabilité d’incidents dans l’espace aérien avec les avions des forces aérospatiales russes, ce qui augmente le risque d’une confrontation directe entre l’Alliance et la Fédération de Russie », a dénoncé le ministère russe de la Défense dans un communiqué.
« Les pays de l’Otan en seraient responsables », a-t-il mis en garde, ajoutant que le ministre de la Défense, Andreï Belooussov avait ordonné à l’état-major « de prendre des mesures pour répondre rapidement aux provocations ».
Car, selon le ministère russe, les drones américains servent « à la reconnaissance et la désignation des cibles pour les armements de précision fournis aux forces armées ukrainiennes » par les Occidentaux.
Après avoir longtemps refusé, de crainte de provoquer une escalade, Américains et Européens ont commencé à autoriser ces dernières semaines, sous conditions, des frappes avec des armements de précision occidentaux en territoire russe pour détruire des sites et systèmes servant à bombarder l’Ukraine.
Garrot tourniquet pour tous
La Russie avait déjà menacé le 24 juin les États-Unis de représailles, les accusant de « tuer des enfants russes », au lendemain d’une frappe en Crimée, péninsule ukrainienne bordée par la mer Noire et annexée par Moscou en 2014. L’attaque avait fait quatre morts, dont deux enfants, et plus de 150 blessés touchés par les débris d’un missile abattus au dessus d’une « zone côtière », selon Moscou.
Car selon le Kremlin, les frappes de missiles de longue portée ATACMS ne peuvent pas être menées par l’Ukraine seule, celles-ci nécessitant des spécialistes, des technologies et des renseignements collectés par les Américains.
A Washington, le Pentagone s’est borné à dire lundi que l’Ukraine « prend ses propres décisions ».
Déjà début juin, évoquant des représailles, le président russe Vladimir Poutine avait menacé de livrer des armes équivalentes à des ennemis des Occidentaux pour frapper leurs intérêts dans d’autres régions du monde.
Et si la flotte russe dispose en mer Noire d’une supériorité numérique, elle a perdu de nombreux navires depuis plus de deux ans, visés par des attaques de drones navals lancés par Kiev avec succès.
Grâce à ces frappes, l’armée ukrainienne a repoussé les navires de guerre russes et établi un couloir maritime dans la zone pour exporter ses céréales. Elle tente désormais aussi de frapper l’important dispositif militaire en Crimée, base-arrière de l’effort de guerre russe.
Face aux frappes ukrainiennes, les autorités installées par Moscou à Sébastopol, siège de la flotte russe de la mer Noire, ont demandé jeudi à chaque habitant d’avoir désormais sur soi un garrot tourniquet, un instrument médical servant à stopper les hémorragies.
Dépôt pétrolier touché
L’Ukraine attaque régulièrement aussi à l’aide de drones des sites énergétiques russes, en représailles aux bombardements qui ont ravagé les infrastructures ukrainiennes, forçant Kiev à rationner l’électricité dans tout le pays.
Durant la nuit de jeudi à vendredi, un dépôt pétrolier dans la région de Tambov, à plusieurs centaines de kilomètres de la frontière, a ainsi été attaqué par un drone explosif ukrainien, selon le gouverneur régional Maxime Egorov, provoquant un incendie qui a ensuite été éteint.
Le ministère russe de la Défense a pour sa part affirmé avoir « intercepté » 25 drones ukrainiens dans la nuit au-dessus du territoire russe.
Des combats de haute intensité se poursuivent par ailleurs sur une grande partie du front qui s’étale sur environ 1.000 km. En particulier dans le Nord-Est et l’Est.
Depuis des mois, l’armée russe a l’initiative. Elle a encore lancé le 10 mai une nouvelle offensive sur le Nord-Est, dans la région de Kharkiv, face à une armée ukrainienne en manque d’hommes et de munitions.
Mais selon Kiev, les forces ukrainiennes sont en meilleur posture, maintenant que l’aide occidentale, bloquée pendant des mois, arrive jusqu’aux troupes déployés sur le front.
« Le ratio de consommation de munitions était de 1 pour 7 (en faveur de l’armée russe, ndlr), aujourd’hui il est de 1 pour 3 », s’est félicitée vendredi auprès de l’AFP une source au sein de l’état-major ukrainien.