Farid Goudjil partage avec nous, dans cet entretien exclusif, sa réflexion sur son nouveau roman Infiltré pour un meilleur.
Farid Goudjil s’est confié avec une grande sincérité, en dévoilant non seulement les coulisses de la création de son roman Infiltré pour un meilleur, mais également sa vision en tant qu’auteur engagé. À travers cet échange, il a mis en lumière les thèmes forts de son livre, tout en exposant sa pensée sur les défis sociaux et humains qu’il explore dans ses écrits.
Farid Goudjil a abordé les motivations qui l’ont poussé à écrire Infiltré pour un meilleur, un roman policier captivant, tout en s’attardant sur les dilemmes moraux auxquels sont confrontés ses personnages. Une conversation enrichissante avec un écrivain qui mêle habilement suspense et réflexion sociale.
Entretien réalisé par Brahim Saci
Diasporadz : Votre roman Infiltré pour un meilleur plonge dans les dilemmes d’un policier infiltré. Qu’est-ce qui vous a inspiré pour écrire sur ce sujet ?
Farid Goudjil : Ce personnage, ce policier infiltré, prend naissance dans mon premier roman Je suis, tu es, nous sommes la France. Il traverse l’adolescence avec ses acolytes Osman et Caroline, et par la force des choses il deviendra policier. Ce flic, qui est avant tout un jeune, prône comme son frère Mohamed la bienveillance, il essaye de faire le bien autour de lui, ce qui est loin d’être simple.
Le policier est à mon sens une personne qui a un pouvoir, nous en avons tous un tant soit peu, et si nous pouvions influer et faire le bien, c’est la mission qui est donnée à ce personnage. Je pense avoir été inspiré par l’actualité, la réalité… et la fiction nous amène à donner vie au personnage, comme il peut en exister dans la vraie vie. Je voulais mettre l’accent sur la prévention et pas simplement sur la répression, il est vrai comme le dit le proverbe il vaut mieux prévenir que guérir. Le protagoniste garde en lui cet esprit de liberté, il fait les choses comme il les ressent, et ce n’est pas sans conséquences.
Diasporadz : Djamel, le personnage principal, fait face à des défis moraux intenses. Avez-vous puisé dans des expériences réelles ou des témoignages pour construire son histoire ?
Farid Goudjil : On m’a souvent posé cette question, nous sommes là dans une fiction, j’ai construit mon personnage, je me suis projeté, je l’ai imaginé au fin fond de moi. Mon éditeur me disait que mes personnages avaient de l’épaisseur, j’ai voulu leur donner une âme.
Je m’inspire de la vie, de ce qu’elle apporte, de ce que je vois. Lorsque j’étais en période écriture, je me baladais en scooter, il faisait beau, je me laissais guider par la vague, tout en restant concentré sur la route bien sûr, sécurité oblige. En circulant sur un boulevard je saluais des amis au passage, et là, d’un coup, quelques idées d’écriture sont apparues. Je me suis alors posé un instant pour noter et ne pas perdre le fil et, dans la soirée, j’étais en mode écriture, les idées défilaient.
Il y a des expériences plus ou moins réelles, des mots clés qui résonnent, je les recrée comme je le ressens. Dans le roman, il y a une scène marquante, celle de Jugurtha qui, par la force des choses et de par la bêtise, retournera en Algérie, dans son village qu’il connaît à peine. Il devra alors renouer avec ses origines, se faire accepter par les villageois, ce qui n’est pas une mince affaire. C’est la double peine qui frappe à sa porte.
Diasporadz : Le trafic de drogue, thème central de votre livre, est une problématique mondiale. Comment espérez-vous que votre roman sensibilise les lecteurs à cette réalité ?
Farid Goudjil : Le trafic de drogue est un phénomène qui dépasse la fiction, comment redonner espoir à une jeunesse en perdition ? J’ai été invité par le Centre de Loisirs Jeune de la Police nationale de St Etienne (CLJ 42) pour échanger autour de mon 1er roman Je suis, tu es, nous somme la France. Il souhaitait adapter quelques scènes du livre pour les jouer au théâtre. C’est une manière de sensibiliser le lecteur. La rencontre était enrichissante, les jeunes s’exprimaient à l’image de mon roman, Djamel le protagoniste va à la rencontre des jeunes pour les sensibiliser. D’ailleurs, je suis de nouveau invité par le CLJ 42 pour la sortie de mon roman infiltré pour un meilleur.
Mon ouvrage reste une fiction qui n’a pas vocation à donner de leçon, mais peut être un espoir pour certains, quand on veut on peut, faut-il encore s’en donner les moyens, on pourrait s’identifier au protagoniste comme peut le faire sa nièce dans le livre.
Il est vrai que le chemin est tout tracé dans ce milieu néfaste et il est facile de se laisser guider par la couleur de l’argent, comme je l’explique dans le roman. Il n’y a pas qu’une seule route à emprunter, il y en a d’autres, certes plus complexes car le jeune est parfois stigmatisé en fonction de la couleur de sa peau, de ses origines, de son lieu de vie. Ce n’est pas une généralité mais il faut y faire face et s’en défaire, il faut pouvoir croire en soi, en ses projets.
Diasporadz : Vous êtes également acteur et animateur. Comment vos expériences dans ces domaines enrichissent-elles votre approche en tant qu’écrivain ?
Farid Goudjil : Certes, je puise dans mes expériences pour écrire, pour imaginer mes personnages, je pars d’un constat, d’une difficulté récurrente. Je suis pensif, observateur, j’aime regarder les gens, leur manière d’être, de faire. Dans mon roman, je parle du Centre de Loisirs Jeunesse de la Police nationale, j’ai travaillé à leur côté, je les ai côtoyés, je m’en suis en partie inspiré. J’ai travaillé auprès des jeunes de quartiers durant quelques années, et puis je me laisse guider par mes pensées.
Diasporadz : Vos œuvres explorent souvent des tensions sociales et identitaires. Pensez-vous que la littérature peut jouer un rôle actif dans la transformation des sociétés ?
Farid Goudjil : La littérature joue d’une certaine manière un rôle, peut-être pas assez actif, elle contribue à l’amélioration de la société, elle nous raconte des histoires, nous fait voyager à travers l’imaginaire, elle permet de développer l’esprit critique.
Dans la chanson, nous avons les auteurs qui font passer des messages comme dans le cinéma, le théâtre, et nous avons la littérature, qui est peut-être moins accessible. Il faut donner l’envie de lire, il y a certainement plus de consommateurs d’images que de lecteur.
Il existe dans les villes, dans les quartiers des boites à lecture, ce qui permet à toute personne d’emprunter des livres, de les échanger comme dans les médiathèques, mais avec plus de simplicité.
Diasporadz : Quels projets avez-vous pour l’avenir, que ce soit dans la littérature, le cinéma ou l’engagement culturel ?
Farid Goudjil : Je réfléchis au troisième volet de ma série, il y a eu Je suis, tu es, nous sommes la France, Infiltré pour un meilleur, dois-je poursuivre vers une trilogie ? J’ai commencé à poser les bases, je sais plus ou moins vers où me diriger, mais je ne sais pas si je vais y aller, la question est : Que dire de plus ? Je ne veux pas écrire pour écrire, je dois donner un sens à mon projet, j’y réfléchis.
Lorsque j’ai commencé à écrire mon roman Je suis, tu es, nous sommes la France, j’étais déjà dans l’optique d’aller vers le cinéma, l’histoire s’y prête.
J’ai eu de bons échos des extraits audio de mon roman Infiltré pour un meilleur, l’auditeur plongeait, il imaginait les personnages, un ami réalisateur s’est projeté, il voyait carrément les scènes, il m’a fait un très bon retour. Je vais me pencher un peu plus sur cette idée. Et puis cela m’a conforté dans mon idée d’enregistrer une version audio, un podcast, une série du roman Je suis, tu es, nous sommes la France.
Un projet qui est en cours de réalisation, j’ai actualisé quelques textes restés dans un tiroir, puis dans un dossier sur mon ordinateur. Je travaille sur un projet musical.
J’aimerais développer des projets culturels en lien avec l’Algérie, créer des échanges. J’en discutais avec feu le chanteur Brahim Izri, nous avions quelques idées de projets artistiques. Notre ami feu Idir me disait que j’étais une passerelle entre ces deux rives.
Diasporadz : Un dernier mot peut-être ?
Farid Goudjil : Et bien merci à toi Brahim et à Diasporadz pour cet entretien, ce fut un vrai plaisir, je salue les lectrices et lecteurs de ce média.
Entretien réalisé par Brahim Saci