Au-delà de la réminiscence et du besoin de la reconnaissance culturelle et linguistique du fait amazigh, les événements liés au Printemps berbère d’avril 1980 semblent également se nourrir de sentiments de dépossession de l’histoire et de la culture.
Ces sentiments naquirent pendant la période coloniale en Afrique en Nord. Au Maroc vers 1920, la révolution des Berbères du Rif dirigée par Abdelkrim El-Khattabi contre l’occupant français et espagnol témoigne de cet engagement profond de se réapproprier son destin.
En Algérie, le fait d’avoir jalousement protégé sa culture, ses us et ses coutumes, même pendant la colonisation française, témoigne de l’importance de cette résistance qui a participé à rendre possible une cohésion, une union des Amazigh dans le combat contre le colonialisme.
Plus tard, par les événements du 20 avril 1980 à Tizi Ouzou, la Kabylie revendiqua son droit à promouvoir sa langue, sa culture, mais pas seulement. En exigeant l’instauration d’une véritable démocratie en Algérie, le parti d’opposition, le Front des forces socialistes reprit le combat pour une Algérie libre et démocratique, un combat interrompu par la force issue du coup d’Etat de Boumediene le 19 juin 1965.
L’élan et les revendications qui émanent du Printemps berbère d’avril 1980 se sont propagés à travers tous les pays d’Afrique du Nord et dans l’immigration nord-africaine en Europe, principalement en France. Des organisations extrapolitiques, d’essence culturelle, voient le jour.
Au milieu des années 1980, le Mouvement culturel berbère (MCB) tenta de prendre le relais sur les partis politiques démocrates en Algérie, tandis que le Congrès mondiale amazigh s’organise à travers tous les pays du sud de la Méditerranée.
En France, à l’image de l’Etoile nord-africaine pendant les années 1920, les Nord-Africains et ceux du Sahel essaient de travailler étroitement pour promouvoir cette culture amazighe si longtemps occultée et leur identité africaine. Ils étaient à l’unisson à la première célébration de la Journée mondiale de la Culture africaine et afro-descendante le 24 janvier 2024 dans l’hémicycle de l’UNESCO, cette instance internationale dédiée à la culture et à l’éducation.
A l’inverse des Etats d’Afrique du nord, qui se sont également et pourtant solidarisés dans le combat contre la colonisation, leur peuple amazigh ne cesse de se réclamer de cette nation amazighe éprise de liberté et répartie sur tout le territoire nord-africain.
Il est par ailleurs à saluer que, ces dernières années, chacun de ces pays officialise tour à tour la langue berbère et son enseignement, au moins dans les textes de loi.
Les associations culturelles coopèrent entre elles, mais principalement à l’extérieur du continent. Elles ont trouvé en Europe davantage de facilitées pour entreprendre des initiatives.
En France, les Touarègs du Mali, du Niger, d’Algérie, les Chleuhs du Maroc et les kabyles d’Algérie ont collectivement organisé un carnaval historique à Paris en 2022 pendant Yennayer. Cette idée est reprise depuis à travers toute la France et ailleurs.
Une manifestation réunissant tous les Amazigh du sud et du nord du Sahel est organisée depuis le printemps 2023. Elle aura lieu également en avril 2024, le pari est pris pour la rééditer chaque année.
Le collectif d’associations, regroupant toutes les sensibilités nord-africaines et coordonnant cet évènement, appelle haut et fort au respect de la culture et du peuple amazigh dans toute sa diversité et dans tous les territoires.
L’intérêt pour l’identité se vérifie à travers les différentes et nombreuses manifestations et les productions culturelles, initiées par les diasporas et dans les pays d’origine.
La Renaissance de cette culturelle amazigh si longtemps mise à l’écart par les différents colonialismes et les Etats semble bien réelle. Un long processus de réappropriation de l’identité et de l’histoire commune semble en marche.
Le drapeau culturel amazigh longtemps resté en disgrâce cohabite avec les drapeaux nationaux dans presque toutes les manifestations culturelles publiques. Il fut même un enjeu politique pendant le Hirak algérien.
Les peuples autochtones ne seraient-ils pas en train de prendre leur destin en main, la société civile prenant de l’avance sur les Etats et sur l’histoire ? Les peuples s’entremêlent, coopèrent entre eux, bien que la géopolitique et les relations entre ces Etats frères ne soient pas au beau fixe. La société civile aura en définitive raison sur la logique des Etats, une logique axée sur des intérêts nationaux et de géopolitique.
La faillite constatée au sein de la Ligue arabe inciterait les pays nord-africains à plus de cohésion et de solidarité. La culture et l’identité en partage depuis des siècles, voire des millénaires, seraient sources de développement, de paix et de stabilité régionale au sein d’une communauté de destin en héritage ?
L’identité et la culture rapprochent. La construction européenne et l’émergence de grands ensembles régionaux aux quatre coins de la planète sont des exemples. Il ne resterait qu’un pas à faire, celui de l’intégration des territoires et de l’économie, un vœu pieux cher au président Habib Bourguiba et à Hocine Aït-Ahmed en leur temps. Ne serait-ce pas le prélude d’un espace économique et de coopération qui se dessine dans cet environnement riche de traditions culturelles communes ?
Le Printemps berbère d’avril 1980 aura-t-il raison sur temps et sur l’histoire ?
Lyazid Benhami
Le printemps berbère, dans son berceau, a toujours été secoué avec douceur pour faire goûter la saveur de ses fruits aux générations futures. Le futur a toujours été véhiculé par la sagesse.
Gloire à nos martyrs.
Rejoignez la marche des diasporas amazighes (Kabyles, Touaregs, Rifains, Chleuhs, Chaouis, Amazighs du Moyen-Atlas, Amazighs de Djerba, …).
Le samedi 20 avril 2024, à 14h, à Paris, en commémoration du Printemps berbère !
ⵣ ⵣ Parcours de la place de la République à la place de la Bastille ⵣ ⵣ
Une initiative citoyenne à ne pas manquer !
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ⵣ Affiche et texte d’appel à la marche ⵣ :
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