jeudi, 21 novembre 2024
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Les Algériens en France : si loin, si proches

Les Algériens en France : sous ce terme générique, il y a des chiffres, des statistiques, des réglementations… Il y a aussi des hommes, des femmes, des enfants, des familles. Avec leurs joies, leurs peines. Avec leurs espoirs, leurs réussites, leurs échecs… on ne les connaît pas vraiment, on ressent souvent de l’indifférence à leur égard, parfois de l’hostilité. Notre mémoire collective a occulté les injustices dont ils furent les victimes. Pour comprendre le présent, il faut connaitre leur histoire.

Les éditions La Découverte nous proposent sous la forme d’une bande dessinée l’histoire des Algériens en France racontée par Benjamin Stora et Nicolas Le Scanff.

On ne présente plus Benjamin Stora, spécialiste reconnu de l’Algérie. Nicolas Le Scanff est un illustrateur, graphiste, directeur artistique. L’historienne Naïma Huber Yahi a écrit une magnifique et émouvante préface.

La marche pour l’égalité, partie de Marseille et terminée à Paris en 1983, sert de pivot au récit en évoquant l’histoire de trois des participants à celle-ci.

La présence des Algériens en France est ancienne. La saga des personnages débute en 1926. Ils sont venus, comme Ali et Abdel, de Kabylie, participer aux travaux pénibles, les premiers arrivant seuls, supportant le poids de l’exil, ayant laissé leur famille.

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Ils ont été maintenus dans des conditions très difficiles : avant l’indépendance ils n’étaient pas des citoyens français à part entière, après ils étaient regardés avec méfiance et considérés comme ceux qui avaient chassé la France d’Algérie.

Entre eux, ils ont eu une vie sociale, associative, culturelle intense. Les Algériens ont trouvé de la force dans la solidarité qu’ils se manifestaient mutuellement, cela passait souvent par des rencontres dans les cafés tenus par les leurs. Certains ont pu s’émanciper par le syndicalisme et la politique.

Pendant la guerre d’Algérie, ils se sont engagés et ils ont pris en majorité position pour l’indépendance de leur pays. On peut cependant souligner que ceux qui ne le faisaient pas étaient l’objet de terribles représailles de la part du FLN.

Ils ont été victimes des luttes d’influence entre les différentes factions, MNA, FLN : ainsi Abdel est abattu par Younes. 

Ils ont aussi été victimes de racisme, de violences policières : plusieurs épisodes tragiques sont rappelés : le 14 juillet 1953,7morts dont six Algériens, cinquante blessés dont quarante-quatre Algériens lors d’une manifestation pacifique ; le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pacifiquement ont été jetés et noyés dans la Seine ;en 1973, une cinquantaine d’Algériens sont assassinés notamment dans la région marseillaise ; en 1986, l’étudiant Malik Oussékine est lynché par les forces de l’ordre …

Au fil des années, le regroupement permet à certains de reconstituer une cellulefamiliale dans des circonstances difficiles au début. Ils vivaient dans des bidonvilles.  Mais à force de volonté, l’intégration se fait, les enfants vont à l’école et la première génération avait compris que celle-ci pouvait être la condition d’un mieux-être et d’une promotion sociale.

Pourtant, ceux de la deuxième génération ont du mal à se situer, d’autant que le regard des autres a tendance à les renvoyer à leurs origines. Et divers facteurs interviennent, les évènements internationaux comme le 11 septembre 2001, la question de l’immigration mal gérée, avec les problèmes des banlieues, les ghettos, l’absence de mixité sociale …

Tous ces évènements ne facilitent pas l’intégration qui connaît des fluctuations et qui est devenue un enjeu politique.

Après avoir achevé la lecture, il reste de nombreuses interrogations : pourquoi a-t-on si mal reçu ceux de la première génération, eux qui venaient aider à la construction du pays ? Pourquoi, alors que le regroupement familial avait été autorisé, a-t-on fait si peu pour accueillir ces femmes et ces enfants qui ne demandaient pour la plupart qu’à bien vivre ensemble avec nous ?

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Cela laisse le sentiment d’un immense gâchis humain. Le même qui apparaît lorsque l’on considère le résultat de la colonisation de l’Algérie par la France.

Par petites touches, les auteurs nous montrent que l’immigration algérienne en France ne fut pas un long fleuve tranquille. Elle est comme un miroir de celle de la présence française en Algérie. Cet ouvrage a le mérite de nous rappeler, ou de faire découvrir à certains que nous avons une histoire commune et que cela crée des liens.

Ce livre est une invitation à l’ouverture à l’autre, grâce au récit de Benjamin Stora qui met les faits en perspective et aux dessins de Nicolas Le Scanff qui donnent un visage et une âme à ces Algériens, les rendant ainsi si proches de nous.

Robert Mazziotta

Les Algériens en France : Une histoire de générations
Benjamin Stora et Nicolas Le Scanff
Les éditions La Découverte

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1 COMMENTAIRE

  1. Lḥara wadda, lḥara ufella (La maison d’en bas, la maison d’en haut) ©
    L’Algérien, là où il est proche, y va.
    À savoir, s’il s’agit d’une qualité ou d’un défaut ?

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