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Maggy de Coster : « Je fais les choses avec amour et passion »

Maggy de Coster entretien

Maggy de Coster nous parle de son œuvre et de son parcours. Photo DR

De Haïti à Paris, Maggy de Coster a fait de la littérature sa respiration, de la plume sa fidèle compagne et une amie salvatrice, la muse n’étant jamais loin.

Nous pouvons dire que Maggy de Coster écrit comme elle respire, la littérature apparait alors comme une question de survie amenant la vie.  

Maggy de Coster cite cette phrase qui résonne dans le temps et au-delà… « À vaincre sans péril on triomphe sans gloire » comme dit Corneille dans Le Cid.

Entretien réalisé par Brahim Saci

Diasporadz : De Haïti à Paris, vous avez beaucoup écrit, qui est Maggy de Coster ?

Maggy de Coster : Mon parcours poétique a commencé à Jérémie, ma ville natale, baptisée Cité des Poètes, alors que j’étais en 3e quand je suis devenue la co-directrice de la revue poétique intitulée « La Jeune Muse ». Je me passionnais pour l’écriture dès ma plus tendre jeunesse où je couchais sur du papier mes premiers vers.

Je lisais les fables de La Fontaine qui m’ont inspiré mon premier poème puis Apollinaire, Rimbaud, Leconte de Lisle, Paul Claudel, André Lévesque (une poète canadienne) et bien d’autres

Peu après, dans la capitale, j’ai été repérée par le poète et professeur de Lettres Christophe Charles qui publiait mes poèmes dans « La revue des écoliers » qu’il dirigeait avant de m’accorder une pleine page dans sa rubrique au quotidien Le Nouveau monde, intitulée « Poètes pour demain ».

Sur ces entrefaites, je venais à faire partie des jeunes poètes de ma génération qui ont publié pendant leur adolescence. Cette précocité s’explique par le fait que nous étions tous préoccupés par la dégradation de la situation sociopolitique du pays et par le besoin de dire notre refus des conditions matérielles d’existence dans lesquelles évoluait le peuple haïtien.

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Bien que passionnée par le monde littéraire, je voulais être médecin : être un penseur pansant les plaies physiques, j’ai préparé le concours et n’ai pas réussi mais je ne regrette rien.

Diasporadz : Vous êtes habitée par la passion des arts, racontez-nous ?

Maggy de Coster : Je suis à la fois curieuse et insatiable de nature donc je pense qu’on n’a jamais fini d’apprendre. Les savoirs sont tellement étendus qu’une vie ne suffira guère pour tout absorber et digérer afin d’en garder la substantifique moelle pour parler à la Rabelais.

J’ai appris au cours de journalisme que pour être efficace on doit s’intéresser à tout, en d’autres termes avoir une bonne dose de culture générale. Je n’avais pas attendu que je sois à l’Université pour commencer à me meubler l’esprit. Je me rappelle avoir commencé à lire Madame Bovary qui faisait partie des livres de la bibliothèque familiale alors que j’étais en classe de 6e seulement.

Diasporadz : Vous voguez sans avoir peur des vagues, vous battez des ailes sans avoir peur des orages, vous paraissez si libre, à quoi est due cette magie ?

Maggy de Coster : « À vaincre sans péril on triomphe sans gloire », comme dit Corneille dans Le Cid. Je suis jusqu’au-boutiste.

Je me suis toujours dit que : si j’arrive à réussir dans tel ou tel domaine, ce n’est pas parce que j’ai de la chance mais tout simplement parce que je suis très patiente, très obstinée et très dure envers moi-même et du coup, je ne supporte pas l’échec ; je suis toujours prête à recommencer tout en repartant sur de nouvelles bases.

J’ai envie de dire aussi parce que je me suis toujours pensée d’abord en tant qu’être humain avec mes forces et mes faiblesses, de l’intelligence et une capacité d’adaptation universelle au lieu de me considérer comme une femme noire à verser dans le communautarisme et le repli sur soi.

En outre, je fais les choses avec amour et passion et non par avidité de gains matériels. Vous savez, je ne suis pas difficile, l’important pour moi c’est de faire ce que j’aime et d’être bien avec moi-même et avec les autres. Je cultive chez moi l’amour et la générosité.

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Diasporadz : Quels sont les auteurs qui vous influencent ?

Maggy de Coster : Comme je l’ai mentionné plus haut, j’ai été influencée par des auteurs français puis par des auteurs haïtiens.

Je suis inclassable me disait le poète haïtien Dominique Batraville mais moi je me considère comme universelle.

Mes sources d’inspiration : le monde, tout ce qui m’entoure. Faisant mienne cette pensée de Raoul Follereau : « On n’a pas le droit d’être heureux tout seul », mon postulat de base était d’écrire pour changer, « changer la vie » comme dit Rimbaud.

Diasporadz : En littérature, vous passez aisément d’un genre à l’autre, comment faites-vous ?

Maggy de Coster : Je suis du genre éclectique et je suis comme une abeille qui butine de fleur en fleur afin de produire le meilleur miel. Je ne me mets pas de barrière, je peux exceller plus dans un genre que dans un autre. Avant de me lancer dans le roman j’ai commencé par l’écriture des nouvelles parce que c’est plus ramassé et plus percutant.

Je tiens cette veine de Maupassant dont la nouvelle la plus courte est « Misti le chat » car les enfants aiment toujours entendre les histoires des animaux. J’ai toujours eu la passion de la lecture car cela me permettait de changer d’univers, de faire des voyages immobiles.

J’aime toujours me lancer des défis. Tant que je ne les relève pas je ne vais pas cesser de poursuivre ma quête avec obstination car je n’aime pas les échecs.

En effet, après ma première publication qui avait été bien reçue à l’adolescence, je ne m’étais pas du tout prise au sérieux même si j’étais passionnée par l’écriture qui se révélait un besoin, voire une nécessité.

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C’est grâce aux encouragements de mes lecteurs qui voyaient en moi – comme dans beaucoup d’autres jeunes de ma génération – un espoir pour demain et qui me disaient à chaque fois à « quand le prochain recueil » que j’avais fini par comprendre qu’il y avait une attente à honorer et que j’étais une vraie autrice en devenir et qu’il fallait combler les attentes en écrivant pour être publiée

L’écriture en tous genres a toujours été pour moi une planche de salut.

Diasporadz : Vous paraissez infatigable, parlez-nous de vos dernières publications ?

Maggy de Coster : Je vais toujours jusqu’au bout de ce que je commence. Il s’agit de la publication d’un auteur latino que j’ai traduit de l’espagnol en français et que j’ai présenté le 12 octobre dernier à la Maison de l’Amérique latine. Selon la Société des Gens de Lettres dont je fais partie, le traducteur littéraire est un auteur potentiel. Il donne vie aux écrits dans sa langue de naissance et les fait connaître sous d’autres cieux. Donc il s’agit d’une nouvelle naissance.

En ce qui me concerne, j’ai un recueil de contes pour enfants paru aux Éditions Unicité, 2023

Mon recueil de poèmes « Les versets simplifiés du soleil levant » publié aux Éditions du Cygne, 2017, est traduit en anglais par Danielle Legros Georges et publié aux USA aux Editions Blue Flare, 2024.

Diasporadz : Que pensez-vous de cette citation « Quand nos aïeux brisèrent leurs entraves, ce n’était pas pour se croiser les bras » de l’écrivain poète haïtien Charles Alexis Oswald Durand ?

Maggy de Coster : Comme dit Ferrat « le poète a toujours raison » donc Oswald Durand avait sans doute vu loin car les poètes sont en quelque sorte extralucides et intuitifs. On est des passeurs de mémoire.

Diasporadz : Avez-vous des projets en cours ou à venir ?

J’ai un ouvrage de collaboration qui sortira bientôt aux Éditions La route de la soie. Il s’agit de poèmes inspirés des toiles de Sarah Mostrel.

J’ai aussi le projet d’un livre poésie-peinture avec un autre peintre.

Je suis en train de traduire des poèmes de l’espagnol en français de l’anthologie Resistir réalisée par la poète franco-équatorienne pour un récital dans le cadre du Printemps des Poètes 2025.

Je me suis mise aussi à la peinture sans me considérer comme peintre mais les peintres confirmés ont trouvé mes créations valables et « exposables ».

Diasporadz : Un dernier mot peut-être ?

Maggy de Coster : Je souhaite continuer d’avoirl a même énergie et la même veine littéraire pour continuer à produire.

Entretien réalisé par Brahim Saci

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